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L'archipel Contre-Attaque

  • : L'archipel contre-attaque !
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30 mai 2020 6 30 /05 /mai /2020 16:53

10 / Le web profond et les réseaux sociaux

Internet, aujourd’hui, c’est le web, un exceptionnel outil de recherche et de connaissance, mais dont l’accès est de moins en moins facile, car de plus en plus bridé, privatisé et contrôlé. Internet aujourd’hui, c’est le web des forums de discussion, des blogs, des réseaux sociaux, des achats en ligne, de la Bourse en direct, des avatars, des leçons de fanatisme, de l’apologie de la marchandise, de la désinformation, de la calomnie, de l’intimité bafouée, des amitiés surnuméraires, de l’apologie du complot, du sexe en sous-texte.

Et la pire des critiques qu’on puisse y formuler, c’est de déclarer que tout cela est peut-être devenu « trop commercial ». Et l’éloge commun nous certifie qu’Internet a permis à des milliards d’individus davantage d’autonomie, la promesse d’une plus grande liberté, et la liberté elle-même.

Ordinateurs, tablettes, téléphones portables, tous interconnectés et désormais plus personne pour se perdre. Voici le monde de la totale transparence, auquel il est impossible d’échapper, et où chacun se sent d’autant plus libre qu’il est librement surveillé. Et tout le monde de supplier pour avoir le droit de porter les menottes du futur.

C’est le rêve formidable de la démocratie des maîtres de la société du Chaos, une loi martiale, librement consentie et étendue au monde entier.

Nous n’avons rien entendu ni vu venir. Au-dedans comme au-dehors, ce que nous prenions sur nos écrans pour une issue donnant sur l’extérieur est un artefact qui s’interpose entre nous et le réel. Et ce que nous voyons du monde, sur ces écrans, ne réfléchit qu’une image composite du néant.

Nous vivons au sein d’une monade numérique, aux trop nombreuses issues pour en avoir une seule d’utilisable, soumis à un flux continu qui nous submerge sous les informations invérifiables, les mensonges, les links, les amis, les images et les connaissances sans liens, sans relations, sans cohérence, sans pensée ni raison ; un flux qui méprise l’inconscient et brise toute résistance psychique ; un flux qui valorise la superstition, le mensonge et la paranoïa ; un flux qui ne nous laisse aucun répit et nous emporte, sans qu’il nous soit possible de résister, ni même de débattre.

Nous ne sommes plus capables d’écouter, silencieusement, pousser l’herbe de l’histoire ; ni d’interroger le passé pour mieux imaginer le futur ; ni même de faire le silence en nous.

Dans un monde déclaré sans avenir, les informations se succèdent dans un processus d’accumulation où l’oubli des premières et des dernières, semble déjà chasser le souvenir des suivantes. Ce qui domine cette incessante quête de la nouveauté se résume finalement à une permanente reproduction du même. Les variations qualitatives et quantitatives des données informatives ne sont que des simulacres, ou, pour le dire selon le lexique d’aujourd’hui, des effets de mode.

La surabondance de données informatives interchangeables et insignifiantes. Plus les post-citoyens sont soumis au flux de ces données, et plus la simple vérification de chacune d’entre elles leur devient inaccessible. Leur quantité seule les rend invérifiables et s’accompagne en retour d’une paupérisation informative croissante.

Au final, le développement exponentiel de ce flux n’est ni d’informer, ni de désinformer, ni même de distraire. Il s’agit seulement d’occuper un espace médiatique sous forme de discours, d’images, de sons, de 0 et de 1 ; de faciliter l’accès à une donnée informative invérifiable de plus.

Pour y parvenir, le monde de la « transparence achevée », le monde de la « fraternité numérique » n’utilise que deux valeurs : vrai et faux, oui et non, 0 et 1, like et no like. Après la ruine de leurs vies et de leurs désirs, même les rêves des post-citoyens ressortent du système binaire.

Face aux impostures d’une liberté light, comment les post-citoyens pourraient-ils échapper à leurs amis numérisés, à tous ces amis qui ne leur veulent que du bien. Pendant qu’ils pétitionnent (likes), qu’ils se mobilisent (likes), comment pourraient-ils comprendre, une bonne fois pour toutes, qu’il serait temps d’abandonner la proie et l’ombre ! Peuvent-ils imaginer qu’ils participent d’un inconscient collectif, d’une conscience collective, d’une noosphère, ou, plus poétiquement que le hasard objectif pourrait exister pour eux aussi ?

Pourtant, ce sont des femmes et des hommes, au service de quelques intérêts « bien compris », qui génèrent et consomment l’ensemble exponentiel de ces données informatives. Rien n’est destiné aux êtres humains qui ne soit l’œuvre des êtres humains eux-mêmes : en matière médiatique, comme ailleurs, les post-citoyens ne consomment que ce qu’ils ont produit consciemment ou laisser produire sans résistance.

Ils ont oublié que des femmes et des hommes ont vécu en des temps qui n’étaient pas réductibles aux seuls algorithmes boursiers ou aux divinations journalistiques, politiques, économiques, religieuses, voire même scientifiques : des temps étrangers aux « humanités numériques ». S’ils accueillent si facilement la réalité d’Internet, c’est peut-être parce qu’ils soupçonnent que rien n’est réel dans leurs propres vies.

La trace de ce qui a été perdu dans le souvenir, la trace de ce qu’il n’est plus possible de transmettre, se retrouve, comme inversé, comme la négation de tous nos souvenirs perdus, dans les processus contemporains de contrôle et de destruction de la mémoire.

Il s’agit là d’armes de guerre qui peuvent prendre deux formes disjointes, mais solidaires : celle du fanatisme islamique et celle de Google.

Le fanatisme islamique s’attaque à la mémoire humaine, aux traces historiques et archéologique qui contredisent le mensonge qu’il veut imposer.

Google attaque la Grande mémoire au nom d’un artefact de mémoire, au nom de la seule mémoire numérique. Cette mémoire, dont elle a le contrôle et l’usage, entend effacer au nom de l’obsolescence, jusqu’au souvenir de toutes les formes anciennes de transmission.

La mémoire numérique n’est pas destinée à l’histoire ; ce qu’elle autorise à survivre ne l’est que provisoirement, comme un condamné à mort qui attend quotidiennement l’exécution de la sentence.

Google et le fanatisme islamique veulent en finir avec l’histoire : ils ne comptent pas laisser d’archives. Leur domination du présent qu’ils rêvent éternel, est la seule histoire possible, celle qui précisément en est dépossédée. C’est toujours, actualisé par une commune barbarie, le même vieux fantasme dérisoire, sanglant et criminel de la fin de l’histoire.

Voir aussi,les autres épisodes ici:

http://l.archipel.contre-attaque.over-blog.fr/tag/la%20societe%20du%20chaos/

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