« Les poètes immatures imitent ; les poètes matures volent ; les mauvais poètes défigurent ce qu’ils prennent, et les bons poètes en font quelque chose de meilleur, ou du moins quelque chose de différent. »
T.S. Eliot, The Sacred Wood, 1920
https://www.bartleby.com/200/sw11.html
The Sacred Wood est un recueil de 20 essais publiés en 1920. L’un de ces essais traite de l’œuvre de Philip Massinger, dramaturge anglais, représentant du théâtre élisabéthain. T.S. Eliot analyse les similitudes entre son œuvre et celle de Shakespeare. Clairement Massinger a plagié Shakespeare. Mais Shakespeare en a fait de même avec Montaigne. La différence entre les deux est simplement le talent.
L’œuvre de Massinger n’est qu’un « écho » de celle de Shakespeare.
Pour André Bonet, et sa politique culturelle, il en va de même.
Lors du conseil municipal du 22 juin 2022, Dédé nous a gratifié d’une petite sortie vindicative de près de dix minutes, histoire de tacler l’opposition qui avait eu l’outrecuidance de déclarer, je cite le journal municipal : « Pour la Culture : la nouveauté se résume à des cubes disposés aux quatre coins de la ville. »
Le communiqué des élus d’opposition peut se résumer à : « Nihil novi sub sole »
Et dans le fond c’est tout à fait vrai.
On ne peut pas dire que ce brave Dédé nous ait gratifié qu’un truc particulièrement nouveau. À croire qu’il a fait sien le conseil que donne Machiavel dans le chapitre VI du Prince : pas d’innovation !
Parce que bon, « l’art prend l’air », c’est du déjà-vu. Et l’idée, à la base, ne vient pas tellement de Dédé. On ne va pas ressortir la polémique que la première édition avait connue, vu qu’ici on ne fait pas dans le réchauffé. Non, on va juste dire que question nouveauté, on a vu mieux.
On va éviter de parler de Ruscino, parce que la vraie histoire est celle de 20 ans d’incompétence et de grand n’importe quoi. Sur le coup la mairie finalise un projet que n’importe qui de sensé aurait finalisé. Là aussi, pas de quoi sauter au plafond.
Le pôle muséal, c’est la même chose. Un projet dont on entend parler depuis des années, mais qui par incompétence et incapacité à comprendre l’importance de la culture pour le développement socio-économique de Perpignan n’a jamais été mis sur la table.
La médiathèque du Haut-Vernet, c’est une très bonne idée. Mais là aussi, il s’agit juste de compenser des décennies de mépris des habitants et de sous-équipement.
L’hommage à Antoine de Roux arrive aussi après que l’ASPAHR a annoncé un séminaire dédié à son travail dans le courant de l’automne 2022. Comme on sait que Dédé n’aime pas l’urbanisme, le plagiat sur ce coup-là est flagrant.
Seul point positif, on notera un peu d’humour dans les noms des événements.
Vu qu’on s’emmerde à Perpignan, Dédé nous a fait un festival « Gastro ».
Pour l’édition 2023, la rumeur prétend que l’événement pourrait être sponsorisé par Tena.
Si l’on sait faire un pas de côté, si l’on sait sortir de la pensée en silo, qui caractérise bien Dédé, soit dit en passant, on se rencontre que cette « politique culturelle » n’est pas juste insipide. Elle est d’abord est avant tout un exemple flagrant de la « métropolisation » de la culture.
Louis Aliot et André Bonet inscrivent leurs politiques dans le cadre des mécanismes de métropolisation. Ils désirent inscrire Perpignan dans le cadre de la concurrence que les « métropoles » se livrent depuis plusieurs décennies. Or, Perpignan n’a pas les moyens de lutter. La ville, ainsi que le département, ne disposent pas d’atout unique, et les élus n’ont pas de vision à moyens longs termes. Ils radotent des recettes sans ambition, en espérant que ça marche.
Manque de pot, ça ne marche pas.
Et ça ne marchera jamais.
Pour se développer Perpignan doit sortir du phénomène de métropolisation. Sauf à devenir la banlieue-dortoir de Barcelone, ou de Toulouse, il n’y a pas d’autre manière d’agir.
Mais ni Louis Aliot ni André Bonet n’ont lu Guillaume Faburel. D’ailleurs Dédé ne lit pas, c’est bien connu.
https://reporterre.net/Ah-qu-il-est-doux-de-vivre-loin-des-metropoles
https://www.cairn.info/revue-d-economie-regionale-et-urbaine-2020-1-page-141.htm
La métropolisation est une « idéologie ». C’est l’idéologie qui nourrit la timocratie, version XXIe siècle.
Et localement, la timocratie c’est le sucre glace sur le gâteau de l’économie de la Rente.
Les timocrates modernes, dont Dédé est un magnifique exemple, ne s’intéressent plus qu’aux honneurs. Ils n’ont pas de fond, ils ne veulent que l’apparence.
À l’inverse des ploutocrates, ils ne cherchent même pas à accumuler de la richesse. Non, ils cherchent juste une forme abâtardie de prestige. Pour citer Francis Fukuyama, ils souffrent de « mégalothymie », c’est-à-dire d’une volonté, maladive, d’être reconnus comme supérieur aux autres.
Hélas, ils sont timocrates, pas « aristocrates ». Leurs faits d’armes ne parlent pas pour eux. D’ailleurs ils n’ont aucun fait d’armes.
Et c’est pas glorieux !
Alors ni plagiaire, ni génie, André Bonet n’est qu’un énième avatar de ces timocrates 2.0 qui pullulent de nos jours. Sans ambition, sans vision, la politique culturelle de Perpignan, sa politique culturelle, n’est ni culturelle ni même une politique à proprement parler. C’est juste une suite d’actions et d’événements sans envergure. Rien qui ne restera dans l’histoire de la ville.
Perpignan a les moyens d’avoir une politique culturelle ambitieuse.
Perpignan a besoin d’ une politique culturelle ambitieuse.
C’est juste que ce ne sont pas les bonnes personnes qui sont en place.
Voir aussi:
Culture / Perpignan: messe pour le temps présent ! par Jordi Vidal featuring Nicolas Caudeville
Covid19 / Occitanie: quel futur pour la culture en région? La réponse du président de la commission culture Serge Regourd, interview par Nicolas Caudeville
Canet: les enjeux de la politique culturelle et son impacte sur la création locale ? interview Pascal Ferro, Rémy Castello par Nicolas Caudeville
commenter cet article …